Archive de la catégorie ‘Voyages’

Soweto : des pierres contre des fusils

Samedi 28 février 2009

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© DR

Si vous marchez dans Soweto, township de la banlieue de Johannesbourg, vous serez marqué par l’immensité du territoire. De petites villes s’inventent les unes près des autres, sans que les communautés véritablement ne se mélangent. Il y a le township des colored, celui des noirs, plus loin celui des indiens. Et encore celui des blancs pauvres. Soweto, on entend les cris de Biko, de Mandela. Sa maison est d’ailleurs là, en travaux, pour devenir un musée à la mémoire du leader de l’ANC et de la lutte contre l’apartheid qui connut dans ses lieux son essor. Quartiers de petits maisons, jardinets proprets, plus loin, c’est le chaos de la tôle ondulée et des enfants à l’abandon d’eux-même, courant, sales, d’une baraque à l’autre, quelques chiens galeux, des poubelles pleines, de la terre battue, pas d’horizon. Le samedi, c’est bien connu, c’est le jour des mariages. On se prend à rêver à l’écho des voix et des chants sortant d’une maison près du Hector Pieterson Museum.
Hector Pieterson, l’enfant du quartier, mort à quelques pas de là, sous les balles de la police blanche, le 16 juin 1976. Des revendications, une émeute, la police qui charge. Le petit écolier dans les bras d’un homme, une femme, une soeur pleure déjà sa souffrance. Un musée lui est consacré à Soweto – une belle réalisation qui embrasse toute la complexité du conflit sud-africain, de la création des townships au temps des mines d’or et de la prospérité de la ville, jusqu’à l’apartheid et les luttes pour en venir à bout. Des pierres contre des fusils. Une plongée dans l’histoire, riche, passionnante. J’en sors bouleversé, captivé par cette histoire effroyable et ces engagements de haute lutte pour le droit à l’égalité.

Hector Pieterson Museum, Soweto.

Françoise Sagan dans la paix de Seuzac

Vendredi 6 février 2009

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Les tombes de Françoise Sagan et de Peggy Roche à Seuzac © Marko Gazdo

Le Lot par tempête. De la roche, il jaillit des cascades, et la rivière, folle, est de boue. Au fond d’un autocar, on passe les villages les uns derrière les autres, petites bourgades de pierre blanche et clocher au milieu. Il fait bon vivre en campagne, dans une retraite toute en douceur. Ici, Figeac et Cahors sont de fières citadelles, vivantes, marchandes, ailleurs la vie de village est réglée par le passage du facteur, les informations de 13h et la fermeture de la supérette à 19h00 pétantes. Le calme. Dans cette paix, un bourg en impose plus qu’un autre : Cajarc. Il a connu d’illustres promeneurs, Georges Pompidou, d’abord, puis Françoise Sagan en charmant petit monstre, désinvolte et rapide. La route de Françoise Quoirez Sagan s’est finalement arrêtée là, une après-midi de septembre 2004, au cimetière de Seuzac. Elle y est revenue, sans vie, entourée des siens : Juliette Gréco, Pierre Bergé, Bernard Frank, Florence Malraux et Ingrid Méchoulan… Le cimetière est un petit enclos en pente, autour de champs de maïs. On y entre en déroulant une chaîne, sans cadenas, rouillée. Près de la tombe de Sagan et de son mari Robert James Westhoff, et en face de celle de sa famille, une stèle identique mais anonyme, vermoulue autant que la première est polie. Sous la pierre repose, discrète, la fidèle compagne de Françoise Sagan, la femme la plus aimée : Peggy Roche. On sort du cimetière, un peu mélancolique : qui, bientôt, sans la moindre inscription sur la tombe voisine, se viendra d’elles, ensemble ?

Histoires d’O. à New-York

Mercredi 24 septembre 2008

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© DR

Le blog du New-York Times est en surchauffe ! Plus de 40 pages de commentaires et contributions assez en pétard contre les installations du plasticien islandais Olafur Eliasson. L’homme par qui le scandale arrive ! 15,5 millions de dollars pour implanter quatre gigantesques cascades sous les ponts de New-York entre les berges de l’East River, Brooklyn et Governor Island. Le résultat est, il est vrai, un peu décevant quand on a connu la magie des soleils dans la Turbine Hall de la Tate Modern à Londres. Sans doute parce que Eliasson a vu trop grand et que ce gigantisme sied mal à ses créations… Reste tout de même une vision, un engagement au service de l’environnement et de la qualité de vie que portent ses « phénomènes » géants qui soufflent une poésie de paysage dans un enfer de verre et d’acier…

Lire les commentaires sur le site du New-York Times.

Van Dongen à Monaco : le temps retrouvé

Vendredi 22 août 2008

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La femme au canapé, 1930 © Succession Kees Van Dongen / SODRAC (2008)

 » Elle était tempéramentale… Un jour, Van Dongen la peignit. Et dans sa gaine, fou d’elle, il l’étreignit. C’était au temps du cinéma muet plus proche de nous que celui de Bossuet. » Charles Trenet.

Plus de 200 toiles de Kess van Dongen, accrochées à Monaco pour une rétrospective de première main, conçue et coproduite par le Nouveau Musée National de Monaco et le Musée des beaux arts de Montréal, en partenariat avec le Musée Picasso de Barcelone, et sans conteste la plus importante manifestation consacrée à Kees Van Dongen depuis celle du Musée d’art moderne de la ville de Paris en 1990 !
Avec de tels arguments, on faisait le voyage à Monaco. Le néerlandais, installé en France dès 1897, figure du Tout-Paris, avait fait, lui, celui à Berlin et payait encore cet indiscutable fourvoiement. Illustrateur ravageur des élégances parisiennes pour les satiriques L’assiette au beurre, Le rire, L’indiscret, Van Dongen est rapidement repéré. Pour sa singularité, son refus de rejoindre un groupe et ses sujets : prostituées, artistes de cirque, gitanes. Tachiste, fauviste, influencé par ses voyages en Espagne, Egypte ou au Maroc, d’où il rapporte le meilleur de son art de femmes d’ocre et rouge charnu, sa carrière brillante s’épuise dans la mondanité des années « folles » entre Paris et Monaco. Il peint alors les grands de ce monde de Brigitte Bardot à Léopold II, roi des belges. L’exposition suit avec précision ce parcours, proposant des oeuvres exceptionnelles qui vous attirent, hypnotisent. Très vite, l’atmosphère Van Dongen vous saisit : la petite écuyère du cirque, un jeune arabe digne de Matisse, et encore tant de belles femmes, les yeux en amande, la bouche charbon magnifique.

Rétrospective Kess Van Dongen, Nouveau Musée National de Monaco, du 25 juin au 07 septembre 2008.

Catalogue aux Editions Hazan.

Ivri Lider : une pop star israélienne

Samedi 28 juin 2008

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Ivri Lider en concert @ DR

Il est une star en Israël, a vendu plus de 200 000 disques, remplissant les plus grandes scènes, attirant un public nombreux à chacune de ses performances. Il vit à Tel-Aviv dans cette bulle gay et frénétique si souvent exagérée par les médias.
Né en 1974 dans un kibboutz, Ivri Lider crée un premier groupe à 17 ans et écrit plusieurs pièces musicales pour des spectacles chorégraphiques qui lui permettent de signer un contrat avec le prestigieux label israélien Helicon Records. Son premier album « Caressing and lying » sort en 1997, le second album « Better nothing than almost » en 1999 : le succès de ces deux disques fait de Lider plus qu’un simple chanteur-compositeur, mais la voix d’une nouvelle génération d’ artistes israéliens. Ivri signe également – avec un succès considérable – dans les bandes originales des films d’Eytan Fox (« Yossi and Jagger », « Tu marcheras sur l’eau » et « The bubble »).
En janvier 2002, avec la sortie de « The New People » au son plus électronique, Ivri Lider prend la décision de parler ouvertement de son homosexualité dans une interview accordée à Gal Uchovsky pour le quotidien à large audience « Ma’ariv ». Année après année, son succès ne se dément pas et il continue une carrière qui peu à peu s’internationalise. Son prochain album est actuellement en production, on peut découvrir son premier single sur son site Internet. Ecoute-le : sa pop, chantée en hébreu, est des plus entêtantes.

Ecouter le dernier titre d’Ivri Lider.

Yad Vashem : la mémoire pour seul héritage

Samedi 28 juin 2008

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© Classic Travel Adventures

Pas un séjour à Jérusalem sans prendre le temps de visiter le mémorial de la Shoah Yad Vashem et le fameux jardin des Justes. Implanté sur les hauteurs de Jérusalem, d’une architecture futuriste donnant après une visite éprouvante sur une vallée boisée, Yad Vashem est un grand lieu de mémoire, remarquablement scénographié qui offre une vision « globale » de la Shoah. De l’antisémitisme du début du XXe siècle au retour des camps, en passant par la vie dans les ghettos de Lodz ou de Varsovie ou l’attentisme et incompréhension de nombreux juifs allemands devant la montée du péril, le travail des historiens est en tout point saisissant par sa justesse. Peu d’effets, des images choisies pour leur force et leur pédagogie, des témoignages vidéo de première source : un impressionnant parcours pour mieux comprendre les heures les plus noires de l’histoire humaine…

Le site du Mémorial Yad Vashem

Les habits verts de la jeunesse d’Israël

Lundi 23 juin 2008

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© DR

Trois ans pour les garçons, deux longues années pour les filles. Impossible d’y échapper, d’espérer la réforme. We want you ! Alors, ils vont, adolescents, faire l’armée, protéger leur pays et pour certains perdre la vie comme le fils de l’écrivain David Grossman au dernier jour des interventions israéliennes au Liban. La gare centrale de Jérusalem est leur quartier général et les cars de la compagnie Egged les mènent par tout le pays remplir leurs missions. Il n’est pas rare de vous retrouver près l’une ou de l’autre dans un bus. Leur jeunesse étonne : elles se maquillent, ils se chamaillent comme une joyeuse bande en goguette, comparent les performances de leur téléphone portable pour passer le temps. Les plus âgés sont armés. Ils portent tous l’uniforme vert khaki, mais chacun à leur manière, avec un sac Winnie l’ourson et de charmantes boucles d’oreille en perle de culture, ici débraillé, là strict. On les croirait à peine sortis du lycée, on frémit à l’idée du premier feu.

M’as-tu vu ? Episode 3

Dimanche 22 juin 2008

Je quitte Jérusalem. Le président Sarkozy et Madame y arrivent. Le programme présidentiel n’a pas été divulgué en raison de la « meute de paparazzi » aux trousses de Mme Sarkozy. La rumeur veut qu’elle visite de manière privée la vieille ville, là où le président Chirac et son épouse se firent particulièrement remarquer il y a quelques années. Dans un taxi, de retour du mémorial de Yad Vashem, le chauffeur m’interpelle sur la jeunesse de notre nouveau président et roucoule à l’évocation de celle qu’il appelle « Super-Madame » !

Shalom Israël : ma nuit au poste

Samedi 21 juin 2008

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© DR

Sur le tapis roulant de l’aéroport de Tel Aviv, des bagages attendent des heures durant leurs propriétaires. Dans l’indifférence générale. Ceux-là sont retenus au contrôle des passeports. Un visa syrien, jordanien, une indécision dans le déroulé de votre séjour, le nom de votre hôtel bafouillé, un passeport grec pour une famille anglaise et vous voici devant une succession d’agents de la police israëlienne de l’air et des frontières. Le nom de votre père ? Le nom de votre mère ? Son lieu de naissance ? Le nom de votre grand-père ? Votre lieu de naissance ? Votre profession ? Le nom de votre hôtel ? La raison de votre voyage ? Les lieux que vous visiterez ? Combien d’argent disposez-vous ? Le nom de vos contacts en Israël ? Pourquoi ce voyage en Israël ? Etes-vous politiquement engagé ? Qui est au courant de votre présence en Israël ? Etes-vous musulman ? Votre mère est musulmane ? Quel est le nom de votre grand-mère ? Où est née votre grand-mère ? Votre grand-mère est musulmane ? Quelle est votre religion ? Quels sont les derniers pays que vous avez visités ? Comptez-vous vous déplacer dans les territoires palestiniens ? Avez-vous des contacts avec les autorités palestiniennes ? Au bout du troisième interrogatoire, vous commencez à vous agacer de ces questions dont l’agent oublie les réponses à mesure que vous les prononcez. Le flot des questions continue et vous en êtes bientôt à votre quatrième fonctionnaire, tout juste sorti de l’adolescence. Même question et cette apothéose pour finir : Le Bénin ? Mais où se trouve ce pays ? Et la policière aux ongles french-manucurés de se faire aider de wikipédia pour convenir de l’existence de ce petit pays de l’Ouest africain…

Olafur Eliasson sous le pont de New-York

Mercredi 12 mars 2008

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© Olafur Eliasson

La nouvelle a paru dans les Inrockuptibles, on la trouve également sur le site « Next » de Libération. Olafur Eliasson, le célèbre artiste danois (Copenhague, 1947), prend ses quartiers d’été sous le célèbre Brooklyn Bridge à New-York pour une installation monumentale intitulée « Waterfalls », soit quatre chutes d’eau spectaculaires sur les berges de l’East River, entre Manhattan, Brooklyn et Governors Island. En 2005, le danois avait embrasé la Turbine Hall de la Tate Modern d’un soleil d’éclipse et d’un brouillard hypnotique à vous faire passer la journée dans cette ambiance d’apocalypse. A découvrir les premiers croquis du projet financé par le Public Art Fund, la Ville de New-York et la compagnie Tishaman, je me dis qu’il faudra ce septembre aller faire un tour à New-York. On y revient !

Waterfalls project, by Olafur Eliasson

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