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Sur la route de Baalbeck, Beyrouth et le Liban se découvrent. La capitale apparaît et disparaît comme un fier port de Méditerranée. Elle semble droite, et non pas meurtrie en son cœur par tant d’années troublées. L’illusion de sa beauté éternelle, le souvenir intact de son âge d’or tient à une reconstruction forcenée qui doit beaucoup au président assassiné Rafic Hariri. Son mausolée immense trône sur la place des martyrs entre le Virgin Mégastore et la grande mosquée de Beyrouth, à quelques pas de l’église maronite. Tout le Liban contemporain est là, moitié Genève, moitié Sarajevo au sortir de son siège. Le souk accueille désormais les boutiques de luxe. Gucci, Prada, Burberry, Benetton, Dior font le ravissement de la gentry libanaise. La réplique de cette image, lauréate du World Press Photo 2006, qui fit couler tant d’encre : une jeunesse photographiée comme insouciante dans les gravats d’un Beyrouth sous les bombes.
Sur la route, vers Baalbeck, on voit le Liban, la Méditerranée, le Mont Liban qui pousse par delà les nuages, la plaine de la Bekaa, terre riche et grasse qui nourrit ce pays de petites villes modernes et de gros bourg paysans. La frontière syrienne est à vol de moineaux. Baalbeck. Plusieurs portraits en pied, gigantesques, de Hassan Nasrallah, chef du Hezbollah, se succèdent et vous accueillent. Plus loin, le QG du Parti de Dieu en impose, portrait de Yasser Arafat en proue. La route se prolonge jusqu’aux temples romains, un des sites archéologiques les mieux préservés au monde. Le péristyle passé, les visiteurs se posent sur les pierres monumentales menant au temple de Jupiter. L’air est chaud, à peine tempéré par le vent de ce presque début d’automne. Chacun rêve enveloppé par les appels à la prière des muezzins. L’usage du monde, même le plus cabossé en ces temps incertains, est notre douceur.