Yannick Rénier et Théo Frilet © Ad Vitam
Ce sont des corps d’abord. Des corps agités, de soleil, de musique et de danse. Des corps et des cœurs meurtris qui sans qu’on nous l’explique se sont retrouvés là, au bord d’une route de Normandie. Cap au sud, vers le sud, celui d’abord de l’Atlantique, puis courir le Pays Basque, traverser les Pyrénées et rejoindre Tuleda, loin, plus loin que Saragosse. En chemin, certains rencontrent d’autres corps, solides de vie et de désirs. Se rencontreront-ils eux-mêmes ? La partie n’est pas facile, quand le cœur se mêle aux corps, tout devient plus difficile. En quelques motifs, en trois phrases étouffées par l’éclat d’un coup de feu ou la fureur d’un jembé une nuit d’été et autant de flashbacks, Sébastien Lifshitz, dont on aime à suivre la piste depuis son solaire « Presque rien », risque un film qui à chacun instant menace de sombrer dans la mièvrerie.
Un frère, une sœur, elle est enceinte, il aime les garçons. Ils ont la beauté du diable. Ils rencontrent Sam, joli garçon triste. Ensemble, ils roulent dans une vieille américaine. C’est presque l’été, ils n’ont rien d’autre à faire que fuir. Fuir pour mieux se trouver. La règle du jeu est simple, donnée dès le début du film. Très court pour un film d’une heure trente, vous me direz… Pourtant, il se passe quelque chose dans ce film fragile et timide qui trouve peu à peu sa puissance dans un monologue avec Samuel (Yannick Rénier) : son mutisme, la recherche d’un dialogue perdu avec la mère, l’impossibilité d’un partage avec le frère, la mort du père impossible à venger et le désir de revenir à la vie auprès d’une famille qu’on se serait choisie. Au final, il faudra à Samuel la solitude pour renaître. Et cette renaissance est belle à vivre au regard de Sébastien Lifshitz. Plein sud, comme un plein soleil sur un être rare et élégant en quête de lui-même. Un « faible cœur», le titre choisi par Lifshitz pour son film avant que ses producteurs ne lui conseillent ce « Plein sud » pour une sortie en plein cœur de l’hiver…
Plein sud, un film de Sébastien Lifshitz, avec Yannick Rénier, Léa Seydoux, Nicole Garcia (1h30). En salles.