Retour à Lyon pour la Biennale d’art contemporain. Sans attendre les commentaires des uns et des autres pour se donner, sans a priori, la possibilité de découvrir les propositions de Hou Hanru, commissaire express d’une Biennale abandonnée par son commissaire titulaire il y a à peine six mois.
A l’heure où de Toulouse à Bordeaux en passant par Reims et Nantes se dessinent une nouvelle géographie « urbaine » de l’art contemporain, Lyon, toujours en tête par la fermeté et l’intérêt de ses choix, semble déshumanisée. Il est ici question du « spectacle du quotidien » mais cela ne veut rien dire. Et toutes les définitions se valent dans l’éprouvante solitude commune à la centaine d’installations venus du monde entier, avec une forte et intéressante représentation des pays du Sud. Têtes, sans doute fort savantes, penchées sur l’art et ses manières, pour une absence de sentiments et des émotions en fuite…
De l’homme, dans ce sévère constat du quotidien, il ne reste rien ou très peu – ultra-industrialisation (Michael Lin), violence animale (Abdel Abdessemed), brûlure théocratique (Fikret Atay), ossements humains en porcelaine d’exportation (Yang Jiechang), baisers sur le sable avant le chaos d’un tsunami (Agnès Varda), bataillon d’une armée mécanique (Jompet Kuswidananto), décharge pleine à ras bord (Barry Mc Gee, Sarkis), dégâts de VHS et de bandes magnétiques copiées à l’infini (Mounir Fatmi), facéties de geek éprouvantes (Alan Bulfin, HeHe), addictions post-modernes (Yangjang Group). Des restes humains que concurrencent des notions – liberté, de circulation (Société réaliste), démocratie (Un nous, Carlos Motta, Robert Milin) – qui semblent fragiles et dégradées (Lin Yilin, Thierry Fontaine, Bani Abidi, Wong Hoy Cheng). De temps à autre, quelques fleurs soulagent (Bik van der Pol, Lei Mingwei). On nous propose de les accueillir à deux conditions : de changer de chemin pour rentrer chez soi et de les offrir à un(e) inconnu(e) dont on bouleverserait, qui sait, le quotidien…
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Archive pour septembre 2009
Une biennale de Lyon sans humanité
Mercredi 30 septembre 2009M’as-tu vu ? Episode 41
Dimanche 27 septembre 2009François Mitterrand croise des touristes français à Florence, les invite à sa table pour déguster le « meilleur chocolat du monde », et il écarte leurs remerciements d’un sourire : « Ne vous inquiétez pas, c’est avec votre argent… »
Anecdote citée par Christophe Dubois et Marie-Christine Tabet dans leur livre « L’argent des politiques » (Albin Michel)
Les cavernes de Ryan Mc Ginley
Dimanche 27 septembre 2009
Wes(Falling), 2009 © Ryan Mc Ginley
Il vous reste une bonne semaine pour prendre l’Eurostar et découvrir le travail du photographe Ryan McGinley. Le jeune photographe américain, qui fit sensation à Paris à la Galerie du Jour à Paris en 2006, expose de nouvelles images à l’Alison Jacques Gallery. Après ses chevauchées dénudées et juvéniles à travers champs, Ryan Mc Ginley a enfermé ses modèles dans des cavernes où stalactites et stalagmites créent un paysage post-lunaire. Dans ces grottes, les corps entrent en matière et deviennent des sculptures minérales, ensuite saturéés de rouge, d’orange, de bleu et de vert par le photographe. Un monde souterrain et charnel s’offre à nous, voyageur inquiété et troublé.
Ryan McGinley, Moonmilk, Alison Jacques Gallery, Londres, jusqu’au 8 octobre 09.
Julie & Julia : une affaire de goût
Dimanche 27 septembre 2009Les celles qui f’saient florès / En robe de Dior et sac d’Hermès / Rangées dans l’musée Grévin / Du ciné-club ou de Sam Levin / Regrettent au temps joli / Du poivre et sel et du bigoudi / De ne pas avoir appris / La cuisine / Qui retient les petits maris / Qui s’débinent…
La chanson de Gréco va comme un gant (de cuisine ?) au petit film charmant de la scénariste Nora Ephron (« Quand harry rencontre Sally », « Le mystère Silkwood »). Deux femmes, deux couples en parallèle, deux histoires d’amour en temps incertains, les sombres années du maccarthysme et l’après 11 septembre. Des temps à se protéger au coeur de la vieille Europe gastronome et bourgeoise, des jours à se recroqueviller dans le nid familial, loin de Manhattan et de l’hystérie de ses anciennes copines de classe, devenues d’affreuses executive-women.
Julia, c’est Julia Child, la grand-prêtresse du « boeuf bourguignon » et auteur d’un classique de la littérature gastronomique américaine « Mastering the Art of French Cooking ». Femme de diplomate, sans enfant, Julia aime la bonne chère et le vin. Quand elle arrive à Paris, sur les marchés, c’est un ravissement des sens. L’ennui lui fait prendre des cours de cuisine et elle devient vite un drôle de marmiton, désossant un canard ici, ébouillantant des homards là, jusqu’à se lancer avec Simone Beck et Louisette Bertholle dans la rédaction d’un guide de cuisine française pour les femmes américaines, qui, après mille vicissitudes, deviendra un best-seller. A New-York, en 2002, Julie se bat avec elle dans une vie bien rangée. Fonctionnaire au service des victimes du 11 septembre, un mari aimant et journaliste à « Archéologie magazine », elle bovaryse un max et se lance, sous l’influence « télépathique » de Julia, dans l’écriture d’un blog culinaire. Un tour de force, digne de Phileas Fogg : les 524 recettes du guide de Julia Child en 365 jours, et autant de haut comme de bas dans sa vie quotidienne dans le Queens…
Tout ira qui finira bien, naturellement. Nora Ephron signe un film au scénario parfaitement huilé, sans doute même un trop. La mise en scène s’efface au profit des numéros des acteurs : Meryl Streep, too much, retrouve un Stanley Tucci impeccable. Amy Adams comme Chris Messina tiennent leurs rôles avec constance. Si on se laisse prendre jusqu’à la ronde des desserts, le film a son charme, mais d’autres, sans doute, le trouveront indigeste. Une affaire de goût…
Julie & Julia, un film de Nora Ephron (2h03). En salles.
Sébastien Castella en triomphe à Nîmes
Dimanche 20 septembre 2009Décidément, les « figuras » de la temporada 2009 n’auront pas laissé de grandes émotions dans les arènes françaises. On se souvient, encore malheureux, des échecs de José Tomas à Bayonne fin juillet et on oubliera très vite la pâle prestation de Morante de la Puebla ce dimanche à Nîmes dans un mano a mano attendu avec Sébastien Castella. Le torero espagnol fit trois tours et s’en fut sans le moindre trophée après trois faenas plates et déconcentrées. Les dames méchantes – elles sont légions sur les bancs des arènes nîmoises – mirent en doute sa souplesse, lui reprochant un embonpoint naissant, contrariant toute vélocité. Les mêmes firent une nouvelle fois les yeux de Chimène à l’intrépide Castella. Le petit prince est devenu Roi. Incontestablement. Il offrit deux séquences d’exception et laissa l’assistance chavirée par tant de bravoure au combat. Il quitta l’arène en triomphe, nos mains rougies de tant d’applaudissements.
Liban : sur la route de Beyrouth à Baalbeck
Dimanche 20 septembre 2009
© Spencer Platt / Getty Images
Sur la route de Baalbeck, Beyrouth et le Liban se découvrent. La capitale apparaît et disparaît comme un fier port de Méditerranée. Elle semble droite, et non pas meurtrie en son cœur par tant d’années troublées. L’illusion de sa beauté éternelle, le souvenir intact de son âge d’or tient à une reconstruction forcenée qui doit beaucoup au président assassiné Rafic Hariri. Son mausolée immense trône sur la place des martyrs entre le Virgin Mégastore et la grande mosquée de Beyrouth, à quelques pas de l’église maronite. Tout le Liban contemporain est là, moitié Genève, moitié Sarajevo au sortir de son siège. Le souk accueille désormais les boutiques de luxe. Gucci, Prada, Burberry, Benetton, Dior font le ravissement de la gentry libanaise. La réplique de cette image, lauréate du World Press Photo 2006, qui fit couler tant d’encre : une jeunesse photographiée comme insouciante dans les gravats d’un Beyrouth sous les bombes.
Sur la route, vers Baalbeck, on voit le Liban, la Méditerranée, le Mont Liban qui pousse par delà les nuages, la plaine de la Bekaa, terre riche et grasse qui nourrit ce pays de petites villes modernes et de gros bourg paysans. La frontière syrienne est à vol de moineaux. Baalbeck. Plusieurs portraits en pied, gigantesques, de Hassan Nasrallah, chef du Hezbollah, se succèdent et vous accueillent. Plus loin, le QG du Parti de Dieu en impose, portrait de Yasser Arafat en proue. La route se prolonge jusqu’aux temples romains, un des sites archéologiques les mieux préservés au monde. Le péristyle passé, les visiteurs se posent sur les pierres monumentales menant au temple de Jupiter. L’air est chaud, à peine tempéré par le vent de ce presque début d’automne. Chacun rêve enveloppé par les appels à la prière des muezzins. L’usage du monde, même le plus cabossé en ces temps incertains, est notre douceur.
M’as-tu vu ? Episode 39
Dimanche 20 septembre 2009Miyuki Hatoyama mange le soleil. Soit. Madame Hatoyama est aussi l’épouse du premier Premier ministre issu des rangs du Parti Démocrate après la longue suprématie des conservateurs japonais. Miyuki, si elle le permet, est encore une délicieuse sexagénaire excentrique qui fait la une des médias internationaux avec des histoires à dormir debout. Ancienne actrice, abonnée des plateaux de télévisions où elle livre ses conseils beauté, déco et gastronomie, elle se veut « compositrice de sa vie », jamais en reste d’un « voyage interplanétaire» ou d’un de ses fameux « petits déjeuners solaires ». Un micro se tend et la voici qui décrit ses festins : « Je mange le soleil, j’aime cela, miam, miam, miam… Cela me donne énormément d’énergie. Mon mari en prend aussi. » La nuit, près de Yukio, il lui arrive d’autres aventures extra-sensorielles : « Tandis que mon corps dormait, mon âme a été propulsée sur Vénus. C’est un endroit très beau, et très vert »… Pour elle, « les rêves deviennent réalité si vous y croyez vraiment ». La preuve, elle a même croisé Tom Cruise lors d’une virée intergalactique. Pas de doute, « il était japonais dans une vie antérieure ». Notre nouvelle sorcière bien aimée…
Entrez dans la légendaire armée du crime
Dimanche 20 septembre 2009C’est après deux belles heures un rien alanguies de film que Robert Guédiguian livre sa vérité. De ce groupe Manouchian à l’affiche de son nouveau film « L’armée du Crime », il a modifié le parcours et la chronologie pour que ses héros entrent dans la légende. Cette honnêteté emporte alors l’adhésion. C’est à une entrée en légende que nous convie donc Robert Guédiguian, réalisateur d’origine arménienne et longtemps compagnon de route du Parti communiste. Qu’importent alors les naïvetés, les trémolos de bravoure et d’amour mélangés, ce Paris de carton-pâte, les ciels lumineux d’une femme courage ou la beauté sauvage de quelques fougueux militants découvrant la lutte armée, Robert Guédiguian forme de ces fantômes fusillés au Mont Valérien en 1944 des héros rassemblés comme ils le peuvent autour d’un poète amoureux, Missak Manouchian, subtilement interprété par Simon Abkarian. Avec toujours le même cœur à l’ouvrage.
L’armée du crime, un film de Robert Guédiguian avec Simon Abkarian, Virginie Ledoyen, Robinson Stévenin, Grégoire Leprince-Ringuet, Jean-Pierre Darroussin (2h19). En salles.
Quand le Byzantin se souvient du Florentin
Dimanche 20 septembre 2009On lui connaît une ironie mordante quoiqu’on ne partage pas ses options politiques. Mais, depuis quelques mois, Edouard Balladur, parlementaire en noble retraite, parle avec une liberté qui intéresse. Dégagé des contingences politiciennes, il fait dans les commissions que lui confie le trépidant Sarkozy œuvre de sagesse avec une faconde propre à sa naissance byzantine qui lui va bien. En cette rentrée, de nouveau, il prend la plume pour conter sa cohabitation avec François Mitterrand, témoin de première vue de la fin de carrière du sphinx présidentiel. « Le Figaro Magazine » en livre dans sa dernière édition les bonnes feuilles, où l’ancien Premier ministre dit tout de l’homme malade, acculé aux révélations sur son passé vichyste et sa double famille, pointe sa méchanceté et sa délectation pour le combat politicien. Il raconte encore comment le Président l’encourage puis n’a de cesse de le faire chuter, ne manquant rien du duel l’opposant à son « ami de trente ans » Jacques Chirac. Un petit trésor de cruauté à lire en attendant les Mémoires du Président Chirac à paraître chez Nicole Lattès en novembre prochain.
Edouard Balladur, Le pouvoir ne se partage pas (Conversations avec François Mitterrand), Fayard.
Dita von Teese en revue à Paris
Dimanche 20 septembre 2009Est-ce la crise financière et ses dommages collatéraux qui poussent Mademoiselle von Teese à quitter les belles demeures des Champs-Elysées pour s’encanailler dans les maisons borgnes des boulevards ? On cherche encore la raison. Survendu comme l’événement de la rentrée burlesque, le Casino de Paris affiche pour la première fois depuis des temps très anciens une revue, mise en scène par Philippe Calvario. Le résultat est indigent, vulgaire et sans hauteur mais, étrangement, le public est là. Il attend les deux shows de Dita von Teese qui illuminent le plateau laissé deux heures durant à des strip-teaseuses, comiques, performers, chanteuses de deuxième zone… Arrive Dita et s’ouvre une parenthèse enchanteresse : d’abord, le cultissime « Be Cointreau-versal », mariage de raison entre la célèbre marque et l’effeuilleuse qui patauge allègrement dans un long verre de cocktail. Une heure, l’entracte passent et pour la première en Europe, Dita von Teese présente son nouveau numéro « Opium Den » sur un air shangaïsé des Cure. Un péché mignon d’une dizaine de minute, scintillant de brillants Swarovski, glamour à mort…