Et mes vœux les meilleurs vous accompagnent pour cette nouvelle année.
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Archive pour décembre 2008
Season’s Greetings 2009
Mercredi 31 décembre 2008Agnès Varda en banc de sable
Samedi 27 décembre 2008
Les plages d’Agnès © Ciné-Tamaris
Agnès Varda ! Pas un magazine qui ne mette à l’honneur la rondouillarde octogénaire, vieille cinéaste et jeune plasticienne, telle qu’elle se définit aujourd’hui. Pour ce qui semble être son dernier film, Agnès Varda fait le chemin « à reculons » sur sa vie bien remplie : rencontres d’exception, ciné-famille qui chante et qui rit, entourée de Jacques Demy, Calder, Brassaï, Jean Vilar, Michel Piccoli, Jane Birkin, Serge Gainsbourg, Michel Legrand, Catherine Deneuve ou Jim Morrison, exil californien, voyage dans le monde entier et retour en mer du nord, à Bruxelles, à Sète et en Avignon pour des moments de belle confession. A son habitude, le film est fait de bric et de broc, un grenier bourré à craquer où chaque vieil objet, dépoussiéré, lustré apporte son lot de souvenirs. Un beau travail sur sa propre mémoire, aussi sélectif que subjectif, mais qui, à la longue, semble un peu vain, roublard aussi et lasse le spectateur…
Les plages d’Agnès, d’Agnès Varda. En salles (1h50).
Frédéric amoureux
Samedi 27 décembre 2008On ne saurait affliger Frédéric Mitterrand d’un « m’as-tu vu / Episode x » que je réserve souvent à la vie politique. Alors mentionnons de quelques lignes la très jolie correspondance qu’il nous envoie de Rome dans la dernière livraison du journal de Pierre Bergé « Têtu ». Frédéric est amoureux, malheureux et éconduit par un jeune homme, « beaucoup plus jeune » que lui, naturellement brillant et charmant. Ils travaillent ensemble, mais le garçon n’a supporté la révélation de cette pamoison naissante. Et Frédéric souffre, et Frédéric écrit, avec les accents d’une nouvelle lettre d’amour en Somalie, sa détresse et ses obsessions d’amour fou. Du premier au dernier amour, il n’est de constance que dans la souffrance et le mal d’aimer. Rome désolée.
Le Caire, de jour comme de nuit
Samedi 27 décembre 2008Les choses, ici, sont de cet ordre. En entrant dans le bureau de Ghamal Ghitany, on est troublé par un cadre. La signature de François Mitterrand. Un billet de félicitations envoyé par l’ancien président de la République au grand auteur égyptien. Dans un autre bureau, un cabinet de dentiste, reçu par Alaa El Aswany, on parle politique, littérature, résidence d’écrivains, chaussure balancée à la face de Georges Bush et du miracle Obama.
Près de dix jours en Egypte, entre Alexandrie et Le Caire, à s’acclimater aux temps égyptiens : l’un, alexandrin, d’un âge d’or révolu fait des mille et une rêveries d’Occidentaux plus attachés à cette terre de légendes anciennes qu’aux égyptiens, l’autre, cairote, fourmillant, espiègle bien que d’une terrible pauvreté.
A Alexandrie, les pieds dans la Méditerranée, la nostalgie rampe mais ne fait plus recette : la grande bibliothèque est vide de ses 600 000 livres, alors qu’elle pourrait en accueillir 8 millions, les étudiants sont là, mais seulement eux et la grande utopie du savoir partagé a fait long feu. Plus loin, la légende Durrell s’écroule : la villa de ses séjours alexandrins est en ruine, abandonnée aux cageots d’un vendeur de concombres, à quelques chats et poules malfaisantes. L’appartement de Cavafis résiste à la dépression, sauvé par le patriarcat grec et le service culturel de l’Ambassade de Grèce en Egypte. Bye bye Moustaki, Omar Sharif, Yolanda Gigliotti et les autres : depuis leur départ vers 1956, c’est de l’autre côté de la Méditerranée que leurs souvenirs trouvent écho. Les femmes ont pris le voile, les hommes, pour certains, sont devenus d’affreux fondamentalistes, les idées courtes, la génuflexion perpétuelle. Les cafés – Elite, Pastroudis et Délices -, en ont perdu leur animation…
La gare d’Alexandrie nous mène jusqu’à celle du Caire. Ramsès, la bien nommée. Le Caire a des allures new-yorkaises, le sable et la poussière en plus. Une ville-monde, une ville-monstre qui engloutit comme elle assimile ses enfants. Une ville aux mille minarets et autant de portraits du président Moubarak, splendeur lassée de ses grands cafés, mais palpitation de ses galeries d’art où l’on découvre une génération nouvelle de photographes et de vidéastes, œuvrant pour une plus grande ouverture d’esprit. Chez Felfela, restaurant incontournable du centre-ville, on croise Simon Njami, l’oeil des rencontres africaines de la photographie de Bamako. Bientôt s’ouvre la Biennale du Caire. Cette Egypte de l’échange africain, du renouveau culturel a besoin de nous, des énergies occidentales dans le respect de son caractère entier. Peut-être alors l’Egypte ne sombrera pas du côté des Frères musulmans ou de l’adoubement d’un autre « démocrate militaire » dans la lignée moubarakienne. Pour lutter, on peut compter sur les taxis cairotes. Un livre en tête des ventes recueille leurs paroles, truculences et autres énervements contre les politiques, les religieux et autres pouvoirs corrompus. Que Mme Suzanne Moubarak bloque la circulation toute une après-midi pour se rendre à l’Opéra, et c’est une bordée d’injures qui devraient la retenir de recommencer, que la police mette des voitures à la fourrière et c’est le premier ministre qui est traité d’incapable et d’aubergine gâtée ! Le Caire, de cet esprit, vit de jour comme de nuit.
Dominique Blanc : douleur exquise…
Dimanche 14 décembre 2008
Marguerite Duras, 1955 © Lipnitzki—Roger Viollet / Getty Images
Visage de Marguerite Duras, détresse d’une femme d’amour qui espère, attend le retour de son mari, Robert Antelme, des camps de la mort. Passage halluciné de François Mitterrand, alias Morland, résistant tardif peut-être mais résistant français, qui retrouve Antelme et organise son retour en France, chez Marguerite, dans l’appartement de la rue Saint-Benoît qu’elle ne quittera pas jusqu’à sa mort, trouvant dans sa propre agonie l’énergie d’embrasser Francois Mitterrand « encore et toujours » alors qu’il la précède de quelques mois dans la mort. Entre eux, on croit puissantes « les forces de l’esprit ». Ils ne se quitteront pas.
Robert Antelme est rentré. Mais le combat continue, une lutte pour la vie, observée des intestins fragiles du survivant jusqu’à ce qu’il ait ce mot : « J’ai faim ! » La lumière s’éteint. Pendant 1h15, Dominique Blanc a donné ce texte inouï. Sa présence fiévreuse vont bien aux mots de Duras. L’ »atmopshère » mise en scène par Patrice Chéreau paraît à la traîne, grandiloquente comme si le metteur en scène qui retrouve pour l’occasion son beau théâtre de Nanterre, devait ajouter sa signature à ce récit qui n’a pas besoin de lui. Un peu d’humilité suffisait.
La douleur, ms Patrice Chéreau et Thierry Thieû Niang, avec Dominique Blanc. En tournée dans toute la France.
M’as-tu vu ? Episode 18
Dimanche 14 décembre 2008
Mme Rama Yade et M. Bernard Kouchner © DR
On sort de cette semaine politique consterné. Micro-remaniement ministériel pour faire une place à Patrick Devedjian et organiser sa succession au secrétariat général de l’UMP. L’ancien militant d’extrême droite se voit attribuer un ministère de la relance, autant dire un placard face à la toute-puissance de l’Elysée et des inspecteurs des finances de Bercy – même si Nicolas Sarkozy a eu la gentillesse pour son ancien porte-gâchette d’installer son maroquin sous l’autorité directe du premier ministre. C’est à n’y pas croire comme dirait Marguerite Duras. Place Vendôme, carrefour parisien des joailliers de luxe, Rachida Dati, sarkozyste d’amour et d’eau fraîche, a perdu la partie : de la une de Point de vue (« Le mystère de l’alliance ») à celle ahurissante du Point (« L’extravagante Mme Dati »), les médias la conspuent.
Peut-être faudrait-il que Bernard Kouchner, ministre diaboliquement médiatique, se méfie et médite sa déchéance ? Sa manière peu commune de célébrer le 60e anniversaire de la Déclaration universelle des Droits de l’homme, en exécutant Rama Yade sur instruction de l’Elysée, « fortement agacé » par la sortie de la jeune sous-ministre, refusant la tête de la liste francilienne pour les élections européennes (qu’elle compare drôlement avec un mariage avec le prince Albert – quelle triste vision de l’Europe !) marquera. Le mot de la fin revient pour une fois à la très inspirée Martine Aubry : « Bernard Kouchner n’est plus Bernard Kouchner »…
Hunger : le poulain dans le mauvais temps
Dimanche 14 décembre 2008
Hunger de Steve McQueen © DR / MK2
Le film de Steve Mc Queen « Hunger » tient encore pour quelques semaines l’affiche de quelques salles d’art et d’essai à Paris et en régions. Le plasticien dont on a pu voir les derniers travaux à la galerie Marian Godmann à Paris en novembre – des vidéos en mur de brique, un cheval fourbu, une bicyclette au fond d’une rivière, dit comme cela ce n’est rien, vu par l’oeil de Mc Queen, c’est essentiel et puissant – raconte les années d’emprisonnement et la mort de l’activiste nord-irlandais Bobby Sands face au pouvoir thatcherien. Ce premier film de cinéma a reçu la Caméra d’or au festival de Cannes 2008. Et ce prix lui va bien : il consacre un film dont la réalisation est inédite, le regard de Steve McQueen sur le combat et la déchéance de Bobby Sands emporte l’adhésion par son souci du corps meurtri, la ritualisation des humiliations et vexations subies par les prisonniers. Avec Michael Fassbender, Mc Queen a trouvé un acteur à la hauteur de son obsession : il le filme comme un résistant à mesure que la faim lui arrache la vie. On peut regretter un certain maniérisme « christique », des facilités dans le traitement de la violence des geôliers mais ce film est vivant, fort et engageant.
Hunger, un film de Steve McQueen. En salles.
DGF : un désespoir de Turbine Hall
Mercredi 10 décembre 2008
TH. 2058 © Loz Flowers / www.flickr.com
La française Dominique Gonzalez-Foerster a les honneurs de la bientôt mythique Turbine Hall de la Tate Modern de Londres. Elle y crée, en un aimable éveil anticipateur – nous sommes en 2058 – un hommage en désordre à plusieurs créateurs contemporains dont Henry Moore, Jean-Luc Godard, Chris Marker ou Louise Bourgeois venue avec son araignée géante et pondeuse. Subtil, précieux et un rien ennuyeux, loin de la maestria d’un Eliasson ou d’une Salcedo.
Th 2058, by Dominique Gonzalez-Foerster, Turbine Hall, Tate Modern, jusqu’au 13 avril 2009.
Cathy Wilkes et Runa Islam au Turner Prize
Mardi 9 décembre 2008
« I Give You All My Money » © Getty Images
Le prix Turner 08 est allé le 1er décembre dernier à Mark Leckey pour une exposition assommante que l’on peut voir à la Tate Britain pour quelques jours encore à Londres. Il y avait parmi les finalistes deux femmes au talent impressionnant : Cathy Wilkes et Runa Islam. Le première proposait une installation féroce contre le consumérisme ambiant : une accumulation de mannequins, caisse enregistreuse de grande surface et autres nourritures matérialistes, la seconde plusieurs vidéos très en beauté : le passage lent des choses sur des êtres fragiles, goût de pluie, odeur du temps, bris de vaisselle. Leurs oeuvres méritaient le prix. Mais gageons que, même sans cette distinction, elle seraient les grandes de demain.
Turner Prize 2008, Tate Britain, Londres, jusqu’au 18 janvier 2009.
Mark Rothko : rouille et tristesse
Vendredi 5 décembre 2008Comme une exposition peut sembler triste parfois. Il y avait pourtant foule à la Tate Modern de Londres à circuler devant les tableaux de Mark Rothko. Des oeuvres de la dernière partie de sa vie, des commandes et des tableaux rouge rouille d’un ennui mortel. Je n’ai fait que passer. En témoigne la minceur de ce billet.
Mark Rothko, Tate Modern, Londres, jusqu’au 1er février 2009.
Mark Rothko Mural for End Wall (Untitled) [Seagram Mural] 1959 National Gallery of Art, Washington Gift of the Mark Rothko Foundation Inc.