Diana Vreeland © Horn
Il est des salles de théâtre qui vous disent d’instinct ce que le spectacle sera. Samedi, à 18h30, au Théâtre du Rond-Point, Claire Nadeau donnait « La divine miss V. ». Sur le gradin, un aéropage de garçons sensibles, quelques solitaires, des familles de théâtreux, un garçon androgyne à sa maman et des femmes âgées assez chics tendance 16e qu’on appellerait plus communément des « mémés » dont le sillage révèle une addiction aux parfums Yves Saint-Laurent. « Yvresse » quand tu nous tiens !
Mais revenons à cette miss V. V comme Vreeland. Diana Vreeland. Mémorable rédactrice en chef du « Vogue » américain, figure du Tout-New-York, Anna Wintour (le diable en Prada !) avant l’heure, immense professionnelle et monstre de colère dans la même minute, virée de son cher magazine en 1971 et consultante ensuite pour l’Institut du costume du Metropolitan Museum de New-York, où elle meurt en 1989. En 1995, Mark Hampton et Mary Louise Wilson créent en Californie puis à New-York « Full gallop », un one-woman show qui retrace la « déchéance » de la Vreeland. La pièce est un succès. Elle est jouée aujourd’hui pour la première fois à Paris dans une adaptation de Jean-Marie Besset, également à l’affiche à 21h00 avec un déplorable « Perthus », lamentablement soutenu par la vieille garde de la critique théâtrale française (Jean-Pierre Léonardini, Gilles Costaz, Jacques Nerson)…
Une histoire vraie, donc – celle d’une femme désargentée, portant toujours le deuil de son Reed de mari, cherchant coûte que coûte à refaire surface après un long voyage en Europe, servie par une Claire Nadeau au mieux de sa forme, masque blafarde et ensemble noir chic, rang de perles idoine. Une actrice dans son registre – pose snob et débit de New-Yorkaise de Lexington avenue, porte-cigarette compris - que le public connaît par le café théâtre (une complice de Coluche), la publicité (« les quenelles Petit-Jean, c’est bon, mangez-en ») ou la télévision (« Mme Foldingue » de Stéphane Collaro, « Palace » de Jean-Michel Ribes) et oublie qu’elle a joué aussi chez Michel Deville (« Dossier 51″), Claude Sautet (« Nelly et M. Arnaud »).
Pour le reste, peut-on parler de mise en scène ? Une fois installée, dans le décor lourd, reconstitution efficace de la chambre de Diana Vreeland, Jean-Paul Muel ne sait plus quoi faire de son actrice. Elle donne le texte avec un certain éclat, mais dérive très vite dans cette hystérie de rouge. Si bien ou surtout si mal que l’on s’ennuie rapidement à cette litanie de mondanités boulevardières. Une heure et quart passe jusqu’à la scène finale où la journaliste retrouve sa superbe et nous émeut, mais il est trop tard, le rideau vient de tomber.
La divine miss V., ms Jean-Paul Muel, Théâtre du Rond-Point, jusqu’au 26 octobre.