Jeanne Balibar et Sylvie Testud dans « Sagan » de Diane Kurys © DR
»Sagan, Françoise. Fit son apparition en 1954, avec un mince roman, « Bonjour tristesse », qui fut un scandale mondial. Sa disparition, après une vie et une œuvre également agréables et bâclées, ne fut un scandale que pour elle-même ».
Certains ont pu dire que « Sagan », le film de Diane Kurys retraçant sa vie et, par instants, sa carrière après le succès de « Bonjour tristesse » n’était pas à la hauteur du « charmant petit monstre » (selon Mauriac), privilégiant l’anecdote sur la création littéraire. J’ai vu le film cet après-midi. Il m’a plu. Bien sûr, il est formaté pour la télévision et trop d’acteurs renommés (Denis Podalydès, Arielle Dombasle, Pierre Palmade, Guillaume Gallienne, Samuel Labarthe, Margot Abascal) se succèdent pour camper les personnages clés de la « petite bande » (Guy Scholler, Jacques Chazot, Bernard Frank, Florence Malraux) au risque qu’aucun d’entre eux ne trouve sa véritable épaisseur, emporté par une histoire devenue plus grande qu’eux…
Pourtant, par-delà ces conventions, deux actrices, Sylvie Testud (Françoise Sagan) et Jeanne Balibar (Peggy Roche), irradient. Elles sont des femmes « Sagan » toutes entières. Par la direction de ses deux comédiennes, Diane Kurys vise juste. Toutes ces années, faites de casino, de nuits agitées et de sommeil léger, tiendraient, pour la cinéaste, par l’amour d’une femme, Peggy Roche. Quand les amis « assommants » vous barbent de leur admiration ou de leur légèreté, quand les drogues n’ont plus d’effet, quand la page reste blanche, il y a Peggy. Peggy la belle, Peggy la classe, lunettes et pantalon oversize, Peggy l’alcool, Peggy l’amour… Peggy meurt et c’est Sagan qui fâne, dépendante des drogues, des médicaments et de l’argent d’une autre, recroquevillée dans son fauteuil normand, absente à la réalité, abandonnée des mondanités parisiennes. En bout de course, une mort comme anonyme dans la grisaille d’une clinique normande… L’amour de Peggy Roche, tardivement révélé, donne à ce « Sagan » sa raison d’être, sa beauté et son incandescence comme une pierre essentielle à sa postérité. Suffira-t-il à faire relire les beaux romans « bâclés » de Sagan ?
Sagan, un film de Diane Kurys. En salles.