Mon frère et mon père, Silver Spring, Maryland, 1988 © Annie Leibovitz
Sortir en paix comme réconcilié d’une exposition est un plaisir rare. Deux ans après la publication d’ »Une vie de photographe » (La Martinière), la photographe américaine Annie Leibovitz expose quinze années de travail professionnel et autant d’images de famille dans un accrochage qu’elle a intégralement supervisé à la Maison européenne de la photographie à Paris – dans une ville qui lui est chère puisqu’elle y a longtemps partagé un appartement, l’ancien atelier de Picasso quai des grands Augustins, avec sa compagne Susan Sontag, morte d’un cancer en décembre 2004 à New-York.
Connue pour ses photographies de personnalités politiques (Bill Clinton, Georges Bush Jr, Elisabeth II) et de stars hollywoodiennes pour les magazines Vanity Fair et Rolling Stone, Annie Leibovitz, offre ici un autre regard sur sa vie de photographe qui se mêle avec intensité à sa vie de femme, de fille, de mère, de soeur. Une femme pressée qui se mobilise, sur les pas de Susan Sontag, pour le Rwanda, la Bosnie-Herzégovine, voyage avec elle en Europe ou en Jordanie, fait des enfants et se soucie de la santé des siens qui bientôt disparaissent et qu’elle photographie jusqu’au dernier souffle. Non, n’allez pas dire cela est encore morbide et qu’il serait préférable que Leibovitz se consacre exclusivement à Brad Pitt, Johnny Depp et Scarlett Johansson. C’est précisément en ne détournant pas les yeux de ce que la vie doit à la mort que la photographe traverse le temps, les deuils, témoigne de son appétit de vie, de sa liberté et de son véritable talent.
Annie Leibovitz, une vie de photographe, Maison européenne de la photographie, Paris, jusqu’au 14 septembre 2008.