Michael Stevenson Gallery, Cape Town (Afrique du Sud). Sans conteste la plus belle galerie mêlant art contemporain et photographie de toute l’Afrique et le regard le plus intéressant sur la photographie africaine de nos jours. On y croise David Goldblatt, actuellement exposé, mais aussi Youssef Nabil, Willem Boshoff, Pieter Hugo, Wim Botha… Il y a deux ans, les Rencontres internationales de la photographie de Bamako, coordonnées par Simon Njami, donnait carte blanche à la galerie qui proposait de découvrir le travail formidable de Guy Tillim sur Johannesburg dans une installation de fortune, photographies superbement encadrées posées sur des chaises de classe, dans la Pyramide de la jeunesse de la capitale malienne. Ces photographies, celles d’un chaos total, humanité perdue d’exode rural en townships, corps blessés par la précarité dans un désordre de détritus et de misère, ont été publiées en 2005 par les Editions Filigranes.
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Archive pour 2 février 2008
Michael Stevenson Gallery : l’oeil du Cap
Samedi 2 février 2008Youssef Nabil : le grand sommeil
Samedi 2 février 2008
Marc © Youssef Nabil / Michael Stevenson Gallery
Dernières heures à Cape Town. Le temps de découvrir dans un joli album publié par la Galerie Michael Stevenson les photographies peintes de Youssef Nabil. Nostalgiques et suaves comme le parfum de son Caire natal. Certaines sont connues : elles sont régulièrement publiées par le magazine « Têtu » et ont pour motifs des garçons méditerranéens dans d’assez simples appareils. L’intérêt de ce catalogue, intitulé « Sleep in my arms » est de dépasser le cliché homo-sensible pour donner à voir une œuvre véritable dans un plus large mouvement. Des autoportraits d’abord, qui le mettent en scène dans un abandon réel. Empire du doute et perplexité. Youssef Nabil enlumine ensuite des nocturnes, peint son obsession du sommeil qui mène à la mort ou au fantasme de corps jeunes et désirés. Ces garçons endormis sont autant de fantômes alanguis, tremblant de rêves qui pourraient aussi être des cauchemars d’amours contrariés.
Robben Island pour mémoires
Samedi 2 février 2008
Nelson Mandela, Robben Island, 1994 © Photographers gallery za
Zurayah Abass, Amina Desai, Haroun Gunn, Andile Ma-Afrika, Zuko Siko, Ivan Toms, Joyce Mashamba… Non, bien sûr, ils n’ont pas connu la même gloire que lui. Nelson Rolihlahla Mandela. Ils clament encore son nom avec fierté. Anonymes, matricule de cinq chiffres, emprisonnés, violentés pour avoir pris fait et cause pour l’ANC. Beaucoup ont disparu. Mandela fêtera cette année ses 90 ans. Ils se sont aujourd’hui transformés en sentinelle, gardiens ultimes de cette mémoire collective qu’ils transmettent avec émotion et sans revanche.
Robben Island, une île au large de Cape Town, une léproserie devenue une prison de haute-sécurité pour les militants anti-apartheid. Le prisonnier le plus célèbre fut Nelson Mandela pendant 18 de ses 27 années d’enfermement, mais ce sont plus de 2000 prisonniers qui y connurent des conditions de détention extrêmes : cellules exiguës, travail épuisant dans une carrière de pierres en plein soleil, régimes alimentaires déplorables, isolement ou partage des espaces communs avec des prisonniers de droits communs qui finirent par s’engager aux côtés des ANC !
Lors des débats « Vérité et réconciliation », les anciens prisonniers politiques et leurs gardiens ont décidé de transformer l’île entière en un lieu de mémoire « Robben Island Museum ». Avant de rejoindre l’embarcadère, il faut s’arrêter dans les salles de la « Nelson Mandela Gateway », où plusieurs expositions racontent leurs histoires. Une installation « »Political prisonners and detainees message video mural » est magnifique : elle montre trente-huit anciens détenus – hommes, femmes et enfants nés en captivité – dans un large panorama, témoignant de leur résistance, chantant un gospel à la mémoire de leur lutte. A la fin de la chanson, l’un d’entre eux en appelle à la paix, à la liberté et au développement de la démocratie. L’image disparaît, le noir se fait et c’est le bruit de clés ouvrant les serrures d’une prison que l’on entend…
Le site du Robben Island Museum
A voir : Goodbye bafana, Bille August, 2006 (en DVD).