© Yves Saint-Laurent, Les chants de Maldoror, 1962 / DR
La photo, inéluctablement. Celle d’Yves Saint-Laurent, visiblement très affaibli, dans un récent numéro de « Point de vue ». Auprès du créateur, assis, le visage comme déformé, le Président Sarkozy affiche un sourire crispé. Catherine Deneuve est là aussi, silhouette noire sur veste rouge vermillon, éclatante pareille à ce fameux manteau fuchsia qu’elle portait à l’enterrement de Jacques Demy.
Je cherchais, presque en vain, ces photographies après que l’Elysée a annoncé, début décembre, la remise des insignes de Grand officier de la Légion d’honneur à Yves Saint-Laurent pour « son œuvre artistique autant que sociale ». La cérémonie avait eu lieu au domicile parisien du couturier, en présence de quelques rares amis (Pierre Bergé, Charlotte Aillaud). « Dans la plus stricte intimité » précisait la présidence de la République. La même formule que pour les nécrologies : « les obsèques ont été célébrées dans la plus stricte intimité ».
Il y a quelques semaines, de sombres rumeurs couraient dans les rédactions et donnaient Saint-Laurent, 71 ans, à l’agonie. Dînant à la Méditerranée, avec Vincent J., on apercevait pourtant Pierre Bergé entouré de la rédaction de « Têtu ». Nous nous rassurions alors de cette présence dans « le monde ». Ce soir, feuilletant un livre de Pierre Bergé, dédié par ailleurs à Yves Saint-Laurent, je tombe sur cette dernière phrase : « Je sais bien qu’hier n’était pas mieux qu’aujourd’hui, que ce serait une erreur de le croire, mais si j’ai de la peine à me séparer de cette époque, c’est tout simplement parce que c’était la mienne ».
Les jours s’en vont, je demeure, Pierre Bergé, Gallimard, 2003, Folio 4087